Quatrième de couverture
L'histoire de Pulutsolo est un drame familial qui se déroule dans un pays qui tient à ses traditions, surtout lorsqu'elles profitent à certains. Fille unique et orpheline, elle est déshéritée par la famille de son père. Pourtant, là-bas, et tout le monde vous le dira, les enfants sont sacrés. Mais c'est un mensonge soigneusement entretenu. Résignée, Pulutsolo décide de partir et sa rencontre inattendue avec le concierge de Jésus changera le cours de sa vie. Bien que la justice soit également un mythe dans ce pays, elle rêve d'en faire une réalité. Elle crée une association afin de régler leurs comptes aux escrocs sans scrupules qui déshéritent veuves et orphelins.
Ma lecture
Paru en 2008, L’envers du décor fait partie de la riche bibliographie d’Huguette Nganga Massanga. La justice, voilà bien pourtant ce dont peut se prévaloir cet original roman de l’écrivaine et dramaturge congolaise. Nettement inspiré des faits réels que l’on observe dans la plupart des pays d’Afrique centrale, Huguette Nganga Massanga adopte une attitude de narratrice pour dire le destin réservé à Pulutsolo par la famille de son père.
“Une enfant comme moi, comme moi, n’avait rien à dire dans le partage d’un héritage et de surcroît, j’étais une fille. Elle me demanda de les laisser faire parce que c’étaient aussi les biens de leur frère. J’allais avoir ce qu’ils allaient décider de me donner et même s’ils ne me donnaient rien, je restais leur fille. Ils n’allaient pas me chasser de cette maison. La seule chose qu’elle me demandait, c’était me demander de pouvoir me débrouiller pour vivre”
À travers Pulutsolo, c’est le destin de plusieurs orphelins en Afrique qui donnent au roman tout son sens qu’il soit social ou moral. Ce que montre Huguette Nganga Massanga de la vie des orphelins de ce pays inconnu, c’est le dysfonctionnement de toute la société, de la justice et de la famille; des conditions de vie dégradantes, des rêves brisés et de l’avenir incertain. L’écrivaine touche là une question d’actualité. Cela tient, probablement, à son expérience de journaliste et à son observation minutieuse des réalités sociales : il y a, dans la souplesse et la profondeur figurative, dans l’expropriation des biens de la famille et de toute désaffection familiale, dans la perception de ce qui se passe auquel renvoie chaque mot, chaque idée ou pensée, dans cette façon assez organique de faire de chaque moment une réalité, il y a, donc, dans ce récit un appel à l’humanité et au respect des orphelins.
De Pulutsolo, émane une volonté de lutter, lutter pour retrouver une dignité profonde, une humanité, des droits, parce qu’un orphelin a aussi des droits. La création de l'association est un acte fondateur de ce besoin de lutter pour les autres. C’est ce qui, à mon sens, fait aussi la grâce de ce roman écrit il y a treize ans déjà. Ce roman est un roman social. C’est un authentique roman, qui par sa justesse questionne la société et ses institutions. Huguette Nganga Massanga a réussi à mêler plusieurs thématiques qui tournent autour de la question de la dignité humaine, avec une portée universaliste.
L’envers du décor n’est peut-être pas le roman du siècle, mais il touche une question d’actualité qui amène à une réflexion collective sur le sort des orphelins et des veuves. J’aurais certainement voulu que l’auteure travaille un peu plus les descriptifs et donne plus de caractéristiques au personnage principal, mais ce roman reste essentiel par son contenu et sa qualité...
Nathasha Pemba
Huguette Nganga Massanga, L’envers du décor, Paris, Édilivre éditions, 2008.