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Marie-Françoise Ibovi, de retour avec un polar…
Shékina Ebakata est une fille sérieuse. Sérieuse et intelligente. Mais, la connaît-on vraiment ?
Tous les matins, elle va à l’école. Elle va tous les soirs étudier sous les lampadaires de la ville. Elle a de très bonnes notes et est très appréciée de ses professeurs. Sa mère l’adule. Shékina est son unique enfant. Pour elle, Shékina est la raison de sa vie. Elle l’a élevée seule et elle sait que toutes les deux elles ont le devoir de se soutenir.
Mais un jour, Shékina va étudier sous les lampadaires. Elle ne rentre pas à la maison. Plusieurs jours passent, et elle ne rentre toujours pas. Sa mère, inquiète, fait appel à Kimya Koubemba, une détective privée.
Pour résoudre cette mission qui lui est confiée, Kimya scrute l’intimité de Shékina au point de découvrir qui est réellement cette fille représentée comme une référence par tous. Cette irruption dans la vie de la disparue lui permettra de résoudre le problème du kidnapping. Une base classique comme la plupart des polars certes, l’auteure arrive à créer une atmosphère accablante et à souffler l’incertitude en nous pour chacun des personnages. Chaque lecteur se fait mille scénarios dans la tête durant l’enquête de Kimya. L’originalité de Marie-Françoise Ibovi, c’est de plonger le lecteur dans l’intimité de deux personnages précis : Shékina et Bagando en installant un suspens exténuant dans le polar. Pour autant, on retrouve quelques éléments classiques du genre, comme le juge honnête et plein de bon sens, les innocents torturés, les pistes possibles, les impasses, les suspenses, la manière spéciale d’enquêter de Kimya qui ne laisse passer aucun indice. Tous les personnages sont captivants et nous envoûtent pour leur côté multiple. Marie-Françoise Ibovi n’épargne personne.
On retrouve aussi dans le polar, le style de Marie-Françoise avec des expressions congolaises, l’intertextualité et beaucoup d’humour. Les mystères qui sont dissimulés dans La disparue du Lampadaire rejoignent ceux du commun des mortels. Les personnages sont imaginaires, mais naturels, c’est-à-dire pas mythifiés. Que ce soit la mère d’Ebakata ou encore Madame Bagando, chaque personne a sa part de responsabilité dans ce qui arrive. Rigo Rigobert, qui m’a le plus marquée, est un personnage fort, qui imagine tous les scénarios possibles, qui craque, qui tombe amoureux, qui cuisine, mais qui fait tout pour aider celle qu’il aime depuis toujours. Derrière Rigo Rigobert, qui pourtant a l’air d’un garçon commun, on découvre un homme fort, prêt à faire face à de nombreuses situations, mais qui peut aussi poser des actes imprédictibles. Les autres personnages sont aussi attachants à leur manière : Ndinga, Ana Conda, Oba le malade mental qui en réalité ne l’est peut-être pas, un qui paraît d’abord le plus faible de tous, l’innocent, mais qui est en réalité plein de forces et peut-être de stratégies criminelles… Chacun a un côté sombre, comme tout le monde, mais certains ont atteint des limites qu’on ne saurait imaginer comme Z, le fils Bagando.
Ce thriller qui se déroule dans la ville de Brazzaville a donc tout pour tenir le lecteur en haleine et se démarque par la diversité des questions qu’il amène et thématiques, la prostitution juvénile de luxe. Loin d’être seulement l’histoire d’un kidnapping, La disparue du lampadaire évoque aussi certains sujets tels que les difficultés d’une mère monoparentale, la vente des organes génitaux, le blanchiment d’argent, les relations entre voisins ou la question de la réussite sociale par l’argent, la jalousie. Un polar qui vaut donc le détour, que l’on soit habitué du genre ou pas !
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C’est un polar captivant et à la cadence rapide où tout s’assemble avec recherche et intelligence. Mes encouragements à ceux et celles qui reconnaîtront le ou la coupable dans les dernières pages!
C’est un roman qui se met facilement dans la valise pour l’été !
Nathasha Pemba
Réf.
Marie-Françoise Ibovi, La disparue du lampadaire, Brazzaville, Kemet, 2020.